Jean Cavalier (tome 3) by Eugène Sue

Jean Cavalier (tome 3) by Eugène Sue

Auteur:Eugène Sue [Sue, Eugène]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman, Historique, Société, Littérature d’Oc et de Rhône, Littérature française, 19e
Éditeur: Bibliothèque numérique romande
Publié: 2023-12-11T00:00:00+00:00


XLVI

Le Quartier-Général

Le quartier-général de l’armée royale était établi sur les hauteurs de Tréviès, au milieu des ruines d’un village protestant, éloigné d’environ dix lieues de Montpellier.

Le corps de bataille de M. de Villars, composé de douze mille hommes environ (deux autres corps détachés occupaient Grenouillac et Boucoiran), était campé, depuis la veille, sur le versant de la colline, dominée par le village.

Quoique braves et bien disciplinés, les soldats faisaient cette guerre à contre-cœur. Prisonniers, ils étaient massacrés sans pitié ; vaincus, ils étaient couverts de honte ; vainqueurs, ils n’avaient battu que des paysans souvent à peine armés.

Quelques-uns croyaient les camisards doués d’un pouvoir surnaturel ; d’autres voyaient des Français dans les fanatiques, et cette pensée amollissait leur courage. Cette guerre s’offrait donc dans des conditions toutes différentes d’une guerre ordinaire.

M. de Villars occupait une maison un peu moins dévastée que les autres, et située au milieu du hameau.

Le soleil venait de se lever, la diane avait battu, on relevait les postes ; la plus grande activité régnait dans ces rues naguère encore silencieuses comme des sépulcres ; les chevaux de bataille du maréchal, sellés et bridés, étaient conduits en main par ses écuyers devant la porte de la maison qu’il habitait ; car, d’un moment à l’autre, M. de Villars pouvait vouloir monter à cheval.

Près de là on voyait quelques-uns de ses gentilshommes et de ses pages prêts à lui servir d’escorte ou d’ordonnance.

Au milieu d’eux était assis, sur un banc de pierre, un homme vêtu en paysan. Il avait l’air simple et insouciant ; une corde lui serrait les coudes, venait enlacer ses jambes, et lui laissait assez de liberté pour marcher, mais non pour pouvoir courir. Un dragon, le mousquet armé, ne le quittait pas de vue.

Cet homme si surveillé était le guide de l’armée ; toutes les précautions étaient prises pour empêcher son évasion ou pour punir à l’instant sa trahison, s’il égarait les troupes par une fausse marche.

La cour de la maison de M. de Villars était à chaque instant traversée par ses aides-de-camp ; ils venaient lui rendre compte des reconnaissances poussées de tous côtés pour éclairer et assurer la marche de l’armée.

Les officiers qui avaient commandé quelques partis pendant la nuit se rendaient aussi à l’ordre chez M. de Lalande, major-général de l’infanterie, logé avec M. de Villars.

À la porte de la maison, deux miliciens bourgeois étaient en faction. Ils faisaient partie d’une garde d’honneur appartenant à la troupe urbaine de Montpellier, commandée par maître Janet, le parfumeur, et par son fidèle lieutenant, Thomas Bignol, le marchand de vert-de-gris.

À leur grand regret, ces respectables citadins jouissaient du privilège de suivre M. de Villars, les échevins ayant cru de la dignité de la ville de Montpellier d’offrir au futur libérateur de la province une escorte de milice bourgeoise, comme marque de la respectueuse gratitude de ses habitants.

La position sociale du parfumeur attirait sur sa conduite une telle attention que, malgré sa poltronnerie, il n’avait pu refuser de marcher, entraînant toutefois impitoyablement à sa suite son infortuné gendre et lieutenant.



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