Les cibles (French Edition) by Brouillet Chrystine

Auteur:Brouillet, Chrystine [Brouillet, Chrystine]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Éditions Druide
Publié: 2020-07-29T00:00:00+00:00

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Montréal, samedi soir, 7 septembre

Michel Joubert était toujours impressionné, lorsqu’il allait chez Robin Meunier, par le nombre effarant de plantes, certaines énormes, qui lui donnaient l’impression d’avancer dans la jungle. Ni Grégoire ni lui n’avaient le pouce vert et, à la maison, ils n’avaient qu’un hibiscus, offert l’an dernier par Tiffany et qui n’avait jamais refleuri. Comment Robin parvenait-il à entretenir toutes ces fleurs si exotiques ? Combien d’heures par semaine passait-il à s’en occuper ? Certaines ressemblaient à des colibris, suspendues par des tiges presque invisibles, à des insectes géants aux couleurs vives. D’autres, très hautes, avaient l’allure de sentinelles, postées devant les grandes fenêtres du loft pour protéger l’intimité de leur occupant. Michel ignorait s’il aimait cette ambiance tropicale, cette touffeur ou si elle l’oppressait. Grégoire, lui, s’intéressait aux orchidées parce qu’il savait que certaines espèces donnaient les merveilleuses gousses de vanille avec lesquelles il aimait tant travailler. Est-ce que Robin pourrait un jour lui fournir une gousse fraîchement cueillie ?

— C’est plus compliqué que ça, répondit Robin en souriant. Pour parvenir à ces fameuses gousses, il y a plusieurs opérations nécessaires, l’échaudage, l’étuvage, le séchage, l’affinage. Sans oublier que les fleurs doivent être fécondées… Je n’ai pas les compétences pour réussir à obtenir une gousse.

— J’ai compris, dit Grégoire, je vais continuer à les acheter au marché Jean-Talon. Je te trouve tellement chanceux d’habiter si près. Tu n’as qu’à traverser la rue pour te retrouver en plein cœur du marché.

— C’est quand même un peu bruyant l’été, dit Robin. Mais j’aime vraiment le quartier. C’est vivant, coloré, et il y a toujours de l’activité au marché, même l’hiver. Je ne remercierai jamais assez Sébastien de m’avoir indiqué que ce loft était à louer.

— Le hasard a bien fait les choses, répondit Sébastien Desjardins.

Michel Joubert faillit protester. Le hasard avait certes une petite part à jouer dans cette histoire, mais Robin connaissait Sébastien parce qu’il l’avait soigné lorsqu’il avait été agressé. Sébastien n’avait pas oublié l’empathie que lui avait témoignée l’infirmier et, lorsqu’il l’avait croisé plus tard sur une terrasse du Village, il l’en avait remercié. Ils s’étaient revus, avaient créé des liens d’amitié. Quand Robin avait été éjecté de son appartement deux ans plus tard, Sébastien lui avait aussitôt parlé de son voisin qui quittait son loft pour retourner vivre en France.

— En fait, dit Robin, tu voulais que j’habite en face de chez vous pour avoir quelqu’un qui s’occuperait de ta chienne quand tu t’absentes.

— Tu ne t’en plains pas, fit remarquer Grégoire en souriant.

Sissi suivait Robin dans tous ses déplacements, quêtant des caresses et restant à l’affût des bouts de saucisson que Robin ne manquerait pas de lui lancer dès qu’il retournerait vers l’îlot-cuisine.

— Ça sent bon, nota Michel. Qu’est-ce que tu as préparé ?

— Je n’ai pas de mérite. J’ai tout acheté chez Milano.

— J’aimerais tellement retourner à Rome, dit Sébastien. Et Venise…

— Biscuit a envie d’y aller, fit Grégoire.

— Biscuit ?

— Maud Graham, expliqua Michel Joubert. C’est le surnom que lui a donné Grégoire.

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